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La Revue des Praticiens en Hypnose et Sexologie, dirigée par Joëlle Mignot

Visages du désir amoureux. Joëlle Mignot




Une fois n’est pas coutume, je vais partir du travail d’Erickson avec Jay Haley dans « Changer les couples ». En effet, sont proposés par le maître de l’hypnose, quatre modèles amoureux tout à fait passionnants dans leur proximité avec ce que nous constatons dans les consultations quotidiennes des couples.

Trois présupposés président à ce travail :
- Si aimer est déjà un état hypnotique, désirer s'apparente à la transe et "faire l'amour", dans le beau sens du terme, nécessite un état modifié de conscience.
- Il s’agit ici de partir des fonctionnements de couples « construits » et ayant une vie commune, quel qu’en soit le modèle social (adapté au monde d’aujourd’hui, union libre, mariage, pacs). Ce sont des couples qui disent « s’aimer ».
- L’hypnose en couple peut être une bonne alternative à leur évolution. Nous verrons comment dans la dernière partie de ce travail.
 

QUATRE MODÈLES

Les conséquences de ces « modèles » sur la relation sexuelle sont souvent la source de la demande de consultation. Certains éléments peuvent être «préconscients dans la relation » mais sont essentiellement inconscients, soit pour les deux, soit pour l’un des deux, signifiant un décalage de maturité affective et/ou sexuelle entre les deux membres du couple. Dans ce cas, la souffrance est exprimée surtout à travers la plainte du partenaire.

1 - « Je m’aime moi. »

2 - « Je m’aime en toi. »

3 - « Je t’aime parce que tes yeux… me plaisent. »

4 - « Je veux t’aimer car mon bonheur est ton bonheur. »

Ces quatre modèles de relation gagnent à être éclairés par le concept de « collusion » théorisé par le psychanalyste Jürg Willi 2 qui intègre la notion de couple comme entité à part entière (dyade). La définition du terme est déjà éloquente : « Entente secrète entre deux ou plusieurs personnes pour nuire à un tiers », notion d’entente des deux partenaires, dans le secret de la relation pouvant « nuire » au couple. Cum ludere, la racine latine, renvoie à la notion de jeu, un jeu qui est une sorte de mensonge, qui ne traduit pas tout à fait la réalité. « Cette collusion peut avoir des effets tragiques douloureux, elle est mensonge en tant qu’elle n’est pas reconnue, repérée, voulue par les partenaires qui se trompent chacun, et l’un l’autre, dans ce jeu névrotique inconscient. » Jürg Willi définit trois principes de fonctionnement pour la réussite d’une relation conjugale : le premier est le principe de délimitation, le couple doit se définir nettement en tant que lui-même vis-à-vis de l’extérieur.

Second principe : les pôles régressifs-infantiles et progressifs-adultes ne doivent pas se répartir de façons opposées (et rigides) entre les partenaires. Enfin l’équilibre du sentiment de valeur personnelle doit être respecté pour les deux. En d’autres termes, le couple doit vivre pour et par lui-même, les rôles doivent être souples et non pas fixés (retour à des comportements enfantins), la reconnaissance et la bienveillance doivent prévaloir. De plus, il définit la relation « conjugale » comme un processus soumis aux ambivalences et aux crises qui se confrontent la plupart du temps aux idéalisations du début de la relation. Les phases se succèdent ensuite : phase de création du couple stable, phase de structuration et de productivité, crise du milieu de la vie, vie du couple âgé. Notons que les différents types de collusion ne sont en aucun cas des catégories de vie conjugale mais servent ici de points de repère avec en arrière-plan le conflit.

ERICKSON ÉCLAIRÉ PAR LE CONCEPT DE COLLUSION

Sur ces quelques bases, revenons aux conceptions du couple amoureux pour Erickson éclairé pour les trois premiers par Jürg Willi. La forme infantile est déclinée en deux étapes liées aux narcissismes primaires et secondaires :

1 - « “Je m’aime moi” donc je ne pense qu’à moi, ce que tu désires m’indiffère, c’est mon désir qui compte… comme “je suis toi”. » Sur un plan affectif, les conséquences sur le partenaire sont un sentiment de ne pas être reconnu, d’être dévalorisé, souvent marqué par des effets pour le partenaire comme « Je ne suis là que pour les tâches ménagères, je suis la bonne à la maison » ou « Je ne suis là que pour rapporter de l’argent… » Sur le plan sexuel, la sensation de ne pas compter dans la recherche du plaisir et l’expression des sentiments. Le mode d’approche de la sexualité est calqué sur le mode pulsionnel fusionnel. Mon plaisir d’abord ! L’autre a le sentiment d’être laissé pour compte sur tous les plans. Nous sommes là sur un mode de fonctionnement archaïque. Nous y retrouvons la forme la plus régressive de la collusion narcissique. « L’autre doit vivre pour moi pendant que, comme Narcisse, je suis fasciné par ma propre image… »

2 - « Je m’aime en toi », le moi en toi, c’est-à-dire l’amour fusionnel où la projection de soi en l’autre, « c’est une partie de toi qui me ressemble qui me plaît… »


Joëlle Mignot
Joëlle Mignot est psychologue clinicienne spécialisée en sexologie clinique et en hypnose... En savoir plus sur cet auteur


Rédigé le Mardi 16 Septembre 2014 à 17:02 | Lu 1423 fois modifié le Mercredi 14 Novembre 2018

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